Rendue publique le 8 mai dernier dans le cadre de la réunion annuelle de la Table Ronde pour le soja responsable RTRS (Round Table on Responsible Soy), la dernière enquête du WWF intitulée WWF Soy Report Card 2014 révèle que les entreprises européennes qui utilisent du soja pour l’alimentation des animaux d’élevage n’ont pas pris les engagements suffisants pour réduire les impacts négatifs de la culture du soja en Amérique du sud.
Bien que certaines entreprises soient pionnières dans ce domaine, la plupart des acteurs des filières animales ont encore beaucoup d’efforts à faire pour réduire leurs impacts – directs ou indirects – sur les écosystèmes naturels sud-américains.
Pas de véritable prise de conscience pour la plupart des entreprises des secteurs de la viande, des ?ufs et de l’alimentation animale
Le WWF a interrogé 88 des principaux distributeurs, producteurs et entreprises de l’industrie agroalimentaire ainsi que des fabricants d’aliments pour animaux implantés en France, en Suède, au Danemark, au Royaume-Uni et aux Pays-Bas. Les meilleurs élèves figurent parmi les distributeurs, les industries agro-alimentaire et laitière. A contrario, la plupart des entreprises des secteurs de la viande, des ?ufs et de l’alimentation animale ne semblent pas avoir de réelle prise de conscience : les quelques engagements pris dans ces domaines au niveau national ne sont en réalité introduits que via des initiatives sectorielles volontaires.
Pour Arnaud Gauffier, responsable du programme agriculture du WWF France, « L’Europe consomme 34 millions de tonnes de soja par an et doit donc prendre ses responsabilités pour freiner la déforestation, les risques environnementaux ainsi que les conflits sociaux en Amérique Latine, d’où le soja est importé ». Arnaud Gauffier rappelle par ailleurs que l’enquête du WWF « montre que les entreprises et les pays européens pourraient aisément faire plus, à commencer par augmenter la demande en soja certifié, produit selon les standards RTRS ou Proterra, les deux seules certifications crédibles à l’heure actuelle ».
Le WWF engage tous les acteurs de la chaîne dans un cercle vertueux de bonnes pratiques
Avec près des ¾ du soja produit destinés à l’alimentation animale, l’enquête du WWF permet d’apporter une lecture plus transparente de la situation. En effet, les acteurs de cette filière sont le plus souvent inconnus des consommateurs et éloignés de leurs préoccupations sur les impacts négatifs que la production de soja peut avoir sur les forêts, les communautés locales et le changement climatique. « Si nous voulons arrêter les dommages causés par la production du soja, il faut inciter ces entreprises à jouer le jeu », réitère Arnaud Gauffier.
De plus, « les distributeurs et les industriels de l’agroalimentaire doivent s’assurer qu’ils prennent les bons engagements, quitte à acheter eux-mêmes des certificats pour du soja responsable, à la place de leurs fournisseurs – lorsqu’ils ne s’approvisionnent pas directement en soja – afin de garantir des produits qui ne sont pas issus d’une culture de soja ne respectant pas l’environnement ».
Alors que la moitié des entreprises des secteurs de la viande, des ?ufs et de l’alimentation animale n’ont pas répondu à l’enquête, illustrant ainsi leur trop faible niveau d’implication et de transparence, certaines entreprises sont sur la bonne voie pour atteindre leur engagement de s’approvisionner à 100% en soja responsable d’ici 2015. Nous pouvons par exemple noter les bons résultats d’Arla (Danemark et Suède) et FrieslandCampina (Pays-Bas) pour l’industrie laitière; des distributeurs comme Marks & Spencer et Waitrose (Royaume-Uni) et Ahold (Pays-Bas), ainsi que des industries de l’alimentation animale telle que Lantmännen (Suède).
Aucune entreprise française ne figure parmi les premières places du classement du WWF
Quelle que soit leur place dans la chaîne d’approvisionnement, les solutions existent pour que chacune des entreprises du secteur s’engage dans la voie du soja responsable. Des exemples existent aux Pays-Bas où le secteur laitier s’est engagé à utiliser 100% de soja responsable d’ici 2015 ou en Suède et en Suisse. Là encore, la France est en retard dans ce domaine et le dialogue reste à construire entre les acteurs.
« Seulement la moitié des volumes de soja RTRS a été vendu l’année dernière. Par rapport au prix de la tonne de soja, le surcoût des certificats est dérisoire, indique Arnaud Gauffier. Les entreprises n’ont aucune excuse pour ne pas calculer leur empreinte soja et acheter des certificats RTRS dès à présent ».
Les analyses de risques conduites par le WWF montrent qu’acheter des matières premières issues de l’agriculture responsable réduit les impacts environnementaux et sociaux et augmente la performance des entreprises.