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Pesticides : l’effet boomerang de la sur-réglementation

L’association Forum Phyto publie sa dernière étude d’impact sur les fruits et légumes. Chaque année, les producteurs bio et conventionnels subissent des dizaines de millions d’euros de perte. En cause : le manque de produits phytosanitaires adaptés à la protection de leurs cultures contre les maladies et ravageurs.

Maladies et ravageurs gagnent du terrain. Des dizaines de millions d’euros de perte chaque année faute de solutions phytosanitaires dans les cultures de fruits et légumes. Culture par culture, l’étude de Forum Phyto montre le dénuement des producteurs face aux ravageurs et maladies. Ceux-ci menacent leur récolte. Faute de solutions phytosanitaires efficaces, les résultats sont alarmants :

Au niveau microéconomique, les pertes économiques s’échelonnent de 1 000 ?/ha à plus de 30 000 ?/ha pour certains cas.

Au niveau macro-économique, les montants s’élèvent à plusieurs millions d’euros  selon les filières concernées.

Le constat est le même pour toutes les cultures analysées. En pomme de terre,  cerise, artichaut, mâche, chou-fleur, chou romanesco, brocolis, cultures sous serre comme la tomate, les producteurs bio et conventionnels sont désemparés. Bien que tous soient engagés dans des démarches de progrès visant à l’utilisation raisonnée de produits phytosanitaires et à l’utilisation de méthodes alternatives dès que possible. Ajoutés à d’autres difficultés, ces problèmes entrainent d’année en année une baisse de la production française en fruits et légumes.

Pomme de terre : aucune solution efficace

En 2012, année de forte attaque de larves de taupins, la perte directe dans les cultures de pomme de terre a été de près de 10 millions d’euros, faute de solutions autorisées. Rappelons que les larves de taupins font des morsures superficielles ou creusent des galeries dans les tubercules, les rendant impropres à la consommation. Les producteurs constatent en particulier ces dernières années la recrudescence de l’espèce A. sordidus qui entraine plus de dégâts que les autres.

Pire, la pomme de terre est un cas exemplaire de distorsion de concurrence. L’étude de Forum Phyto constate en effet que certains produits sont autorisés dans certains pays de l’Union Européenne mais pas en France. Conséquence directe : la perte de marchés d’importance comme celui de la Russie qui a annoncé cet été la fin des importations en provenance de l’Union Européenne, du fait de la présence de ravageurs dans certains lots.

Cerise : jusqu’à 90% de perte de rendement

En cerise, la mouche Drosophila Suzukii, parasite exotique, a fait son apparition en Europe en 2009. Depuis 2011, elle en pleine recrudescence. Lorsqu’une parcelle est attaquée, elle devient non récoltable. Les fruits se liquéfient et deviennent non commercialisables. En 2011, une perte directe de 10 millions d’euros pour la filière cerise a été constatée. En 2013, la perte directe estimée est du double.

Son apparition récente dans les cultures rend difficile la lutte, la Drosophila Suzukii étant encore mal connue. Peu de solutions homologuées sont efficaces. Et la réglementation sur leurs conditions d’emploi ne permet pas actuellement d’en tirer une pleine efficacité. « Le diméthoate » constate Forum Phyto, « est homologué et est assez efficace contre Drosophila suzukii, mais son action est faiblement efficace en raison de la réglementation qui oblige à intervenir trop tôt[2] ». Résultat : 50% des producteurs touchés et des parcelles pouvant être atteintes de 15 à 90%.

Le Collectif « Sauvons les fruits et légumes de France » déplore l’extrême lenteur des pouvoirs publics à résoudre ces problème essentiels pour l’avenir de tout le secteur. Comment attirer de jeunes producteurs quand la réglementation vous empêche purement et simplement de produire ?!  déclare Bernard Géry, maraicher et porte-parole du Collectif Sauvons les fruits et légumes de France. «  Nous nous sommes réjouis de l’annonce de la mise en place en décembre dernier par la commission européenne d’une plateforme européenne pour résoudre ces problème.  Mais cela fait plus de 5 ans que le gouvernement français a mis lui-même en place une « commission dites des usages orphelins [3] » pour justement résoudre ces impasses techniques. Où sont les résultats ? L’étude d’impact de Forum Phyto fait état des mêmes problèmes pour les cultures d’artichaut (désherbage), de brocoli et de chou-fleur (mouche du chou), de mâche (Désherbage et désinfection des sols), et pour les cultures sous serre (aleurodes). Comment voulez-vous que nous produisions « Français » si on ne nous donne pas tout simplement les moyens d’être rentables ? »

« Sauvons les fruits et légumes de France »

Né en novembre 2007, le Collectif sauvons les fruits et légumes de France constitue un mouvement de citoyens. Il vise à sortir les producteurs de l’impasse réglementaire dans laquelle ils se trouvent. Il rassemble des producteurs issu de l’agriculture biologique et raisonnée de la France entière, membres de toutes les filières et de toutes les sections professionnelles qui, confrontés aux mêmes problèmes, ont décidé de réunir leurs efforts pour sensibiliser l’opinion et les pouvoirs publics aux menaces qui pèsent sur la production hexagonale et aux moyens d’y remédier ; il ne se substitue pas plus qu’il ne concurrence l’organisation traditionnelle de la profession ; il n’a pour but que de la compléter avec le souci, partagé par tous, de l’efficacité. Toutes les cultures de fruits et légumes y sont représentées. Il obtient le soutien de scientifiques, de médecins, mais également de chefs cuisiniers, etc. Il est soutenu par des élus (maires, conseillers généraux et régionaux, députés et sénateurs).

[1] Cette étude d’impact complète l’étude réalisée en 2010 sur artichauts, radis et pommes.

[2] En raison du DAR (Délai Avant Récolte) de 21 jours, contraignant les producteurs à le positionner trop tôt par rapport aux attaques.

[3] Par analogie avec les maladies orphelines en médecine, on parle d’usage orphelin pour les cultures quand, généralement pour des raisons réglementaires, les producteurs ne peuvent pas assurer correctement la protection de leur culture face à des maladies ou des ravageurs. Les usages orphelins sont une préoccupation majeure des producteurs et de leurs organisations.

Le contenu et les informations publiés dans les tribunes relèvent de la pleine et entière responsabilité de leurs auteurs. Enviro2B ne saurait en aucun cas être tenu pour responsable des informations diffusées. 

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2 Comments Already

  1. Si ils ne sont pas compétent, au point de ne pas comprendre que c’est leur système de production qui les a conduit dans cette impasse, autant qu’ils disparaissent. D’autres plus aptes sauront en profiter, sinon demandez aux éminents spécialistes de ce site de vous produire quelques OGM et là se sera le consommateur qui voudra ne plus de vos produits. Parce qu’au final c’est ce qui est sous-entendu, un site sensé parlez d’environnement qui fait la promotion de tous les conservateurs et des solutions passéistes. Aucun intervenant sur les solutions alternatives? Est-ce crédible?

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